La réforme de la VAE entrée en vigueur le 1er août 2025 apporte plusieurs avancées significatives, mais elle soulève également des questions essentielles, notamment pour les Architectes Accompagnateurs de Parcours VAE (APP VAE). Pour comprendre les enjeux, il est utile d’analyser chaque nouveauté avec ses avantages et ses zones d’ombre.
« Sont pris en charge par le compte personnel de formation, l’ensemble des frais liés à l’accompagnement pour la totalité du parcours de validation des acquis de l’expérience mentionné à l’article R. 6412-1 ainsi que les frais de jury. »
(Articles D.6323-5 et D.6323-7 du Code du travail, modifiés – JORF n°0165 du 19 juillet 2025)

1. La mobilisation du CPF pour financer « l’intégralité » du parcours VAE

Avantage pour le candidat :
Le candidat peut désormais mobiliser son CPF pour couvrir l’ensemble du parcours VAE, y compris les frais d’accompagnement et les frais de jury. Cela sécurise le candidat financièrement et peut lever un frein majeur à la VAE. Enfin…l’intégralité c’est vite dit ! Quel que soit le montant sur leur CPF, la majorité des candidats (sauf quelques exceptions) devront s’acquitter malgré tout de 103€ de reste à charge en CB au moment de la mobilisation de celui-ci. 103€ c’est le montant de reste à charge décidé par le gouvernement pour toute mobilisation du CPF, quel que soit la destination.

Part d’ombre / questionnement :
Reste à charge : ce montant fixe, bien que modeste, reste obligatoire et peut surprendre certains candidats.
Transparence des frais : même si la réforme impose aux APP de notifier les coûts dès le début, tous les certificateurs ne communiquent pas de manière claire et homogène. Certains frais liés à des diplômes spécifiques restent opaques, et les candidats peuvent ne pas connaître le coût réel à engager.
Mécanisme réel de paiement : lorsque le candidat mobilise son CPF, la somme correspondant au parcours n’est pas versée directement à l’APP VAE ( y compris la part en CB). Elle est encaissée par la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), qui gère et conserve les fonds jusqu’à 30 jours après la fin de l’accompagnement.

o Concrètement, un parcours VAE de 6 mois implique que l’APP VAE avance tous les frais liés au suivi du candidat (formation obligatoire, frais de jury, relecture des dossiers, réunions, conseils…) pendant plusieurs mois avant d’être rémunéré.

o Même si l’APP perçoit 30 % d’acompte au démarrage de la CDC, cette somme n’est pas destinée à couvrir les frais liés à la VAE mais simplement à commencer à payer la prestation. Or, peu à peu, cet acompte ne sert plus qu’à couvrir les frais liés à la VAE (formations, frais de jury), et parfois même ne couvre même pas la totalité des dépenses avancées.

Analogie avec un salarié :
Imaginez un salarié qui accomplit toutes ses missions pendant plusieurs mois mais ne reçoit son salaire que plusieurs mois après, tout en devant payer d’avance toutes les charges liées à son travail. Cette situation serait impensable dans le monde salarié classique, et pourtant elle correspond à ce que vivent les APP VAE.

Conséquence :
La pression financière sur les APP peut être très lourde, et cette situation risque de dégrader la qualité et la personnalisation de l’accompagnement, alors que la réforme sécurise entièrement le parcours du candidat.

2. L’obligation d’information et de transparence pour le candidat

Avantage :
Le candidat est mieux informé des coûts et du déroulement du parcours, ce qui augmente la confiance et la lisibilité du dispositif.

Part d’ombre / questionnement :
• L’information n’est pas toujours homogène selon le diplôme ou le certificateur. Certains certificateurs jouent l’opacité et rechignent à donner le coût de leurs certifications dès le début.
• Cette situation accroît la pression financière sur l’APP et peut limiter sa capacité à personnaliser l’accompagnement.

3. Promesse de délais réduits : une avancée sur le papier, mais parfois illusoire

Avantage pour le candidat :
La réforme affiche l’objectif de réduire les délais de traitement des dossiers et d’organisation des jurys, ce qui permettrait un parcours plus rapide et plus fluide. L’idée est d’éviter que les candidats restent plusieurs mois en attente, et de rendre la VAE plus attractive et efficace.

Part d’ombre / questionnement :
• Dans la réalité, certains certificateurs ne respectent pas ces délais, pour des raisons diverses : surcharge de dossiers, manque de disponibilité des jurys, contraintes administratives ou ressources limitées.
• Cette situation peut créer de la frustration pour le candidat et une pression supplémentaire pour l’APP VAE, qui doit assurer le suivi, relancer les certificateurs et gérer l’attente tout en supportant les coûts liés au parcours.
• La promesse de rapidité existe donc surtout sur le papier : si elle n’est pas suivie d’un réel contrôle ou d’incitations pour les certificateurs, le gain attendu en termes de fluidité reste partiellement théorique.

En conclusion

La réforme de la VAE au 1er août 2025 est une avancée majeure pour les candidats : financement via le CPF, reste à charge réduit, meilleure lisibilité et cadre normatif plus structuré.
Mais elle révèle un enjeu critique pour les APP VAE : le mécanisme de mobilisation du CPF, combiné à l’avance obligatoire des frais, crée une pression financière importante. Le risque majeur n’est pas la saturation des accompagnateurs, mais bien la dégradation des conditions d’accompagnement face à des charges que l’APP doit supporter plusieurs mois avant d’être payé.

Pour que la réforme tienne ses promesses, il faudra :
• accompagner les APP dans la gestion financière et administrative,
• sécuriser leur trésorerie,
• clarifier la communication des coûts auprès des candidats et certificateurs.
Sans ces mesures, l’optimisme suscité par la réforme pourrait se heurter à la réalité du terrain, et la qualité de la VAE risque d’en pâtir.